Poulet de campagne, en pauvre, se dit poulet aux hormones.

Le poulet des riches chante au lever du jour. Tous les matins, une brave fermière l'appelle : Petit, petit, petit... en lui tendant une main pleine de grain. Il fait de la gymnastique, il est musclé. Il est heureux...

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Le poulet des pauvres ne chante pas au lever du jour. Il n'a pas de raisons de chanter, il ne voit jamais le jour se lever. Il est parqué dans un énorme poulailler sans air, avec des milliers d'autres malheureux. Il n'a aucune intimité. Pas de moyen de s'isoler, même pas un petit coin toilette. Pas une lampe de chevet qu'on peut éteindre pour dormir, seulement de gros projecteurs au plafond, allumés jour et nuit. Pas de fenêtre, il ne voit jamais le jour. La campagne, il ne sait même pas ce que c'est.

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Il ne connaît même pas sa mère. Il est arrivé en œuf et en camion avec des milliers d'autres. On ne lui parle jamais, on ne lui a jamais dit : Petit, petit, petit.

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Parfois, il regarde ses pattes tristement. Elles ne servent à rien, il ne peut pas se déplacer, il y a trop de monde. Il regarde ses ailes, elles ne serviront jamais, il n'y a plus de ciel. Il était pourtant bâti pour courir, dénicher des vers de terre avec son bec, voleter. Quel gâchis. Et le pire, c'est qu'il sait qu'un jour, ça va se terminer mal. Un aspirateur à poulets va l'expédier dans l'au-delà, il ne sait pas quand. Il attend, anxieux, sa fin du monde. Il se souvient encore de l'impatience avec laquelle il a cassé sa coquille. S'il avait su, il ne serait pas venu. Il ne serait jamais sorti de l'œuf. Il regrette de ne pas être né à Sprimont. Il a envie de se venger. Il n'a trouvé qu'un moyen : il est dégue à bouffer. Demandez aux pauvres.

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